Capítulo 1
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Avertissement de contenu
- Langage grossier
- Non respect de l'intégrité et l'autonomie des androïdes. Rien ne va au-delà de ce qui se passe dans le canon, la seule différence est que la narration décrit ce qu'il se passe dans leur tête donc ça rend la chose potentiellement plus violente. Voici la liste pour ce chapitre:
- On force unE androïde à se déplacer quelque part contre son gré.
- Non respect de ses limites (à savoir des gens s'introduisent dans sa chambre sans son consentement)
- Maltraitance de Dóminus et Charlie envers Luz (encore une fois équivalent au canon pour Dóminus, et c'est équivalent pour Charlie)
- Évanouissements
La fête de cette année est encore plus ostentatoire et excessive que celle de l'année dernière, c'est dire. L'entièreté les scientifiques dans la salle méticuleusement décorée se demandent si tout cet argent jeté par les fenêtres n'aurait pas mieux fait de finir dans leurs poches, ou au moins partir dans la création de nouvelleaux androïdes de dernière génération. Évidemment, il n'y a que cette deuxième partie que tout le monde ose dire à haute voix.
Le patron a toujours eu cette terrible habitude, celle de célébrer ses prétendues victoires préventivement, sans être certain qu'il allait bel et bien gagner. Ce soir on compte parmi les invitéEs le président Del Nido, que Charlie semble vivre pour impressionner. Ce n'est que dans les dernières minutes que le président a réussit se libérer du gérant de cette branche en prétextant avoir entendu quelqu'un l'appeler. Depuis il passe de table en table et alpague n'importe qui dans n'importe quelle conversation pour esquiver Charlie.
Chaque année, l'entreprise E.GG organise une fête pour ses employéEs et leurs familles. Habituellement, elle sert à les retenir dans l'entreprise le plus longtemps possible, puisque des études ont démontré les bénéfices de ce genre d'événement sur la rétention d'employéEs. Cette année cependant, avec le lancement du projet FR4NK13, la fête est surtout un prétexte pour que Charlie puisse célébrer ce qu'il choisit d'appeler ses réussites.
Le projet FR4NK13 concerne la création de l'androïde de dernière génération nommée Franky. Après cinq longues années de travail, ce projet mené par Sofía Andrade -la poule aux œufs d'or de E.GG- peut enfin commencer. Franky est une androïde extraordinaire, tout le monde est d'accord sur ce point. Même si elle n'a passé que deux petites semaines comme élève dans le lycée CMA, ses prouesses parlent d'elles-mêmes.
Malgré la présence de quelques bugs que Charlie et Sofía ont pour l'instant du mal à expliquer, Franky est vue par ses camarades comme une humaine comme les autres. Il ne fait aucun doute que Franky est l'une des candidates les plus prometteuses pour l'estimé concours d'androïdes qui se déroulera mi septembre.
Cependant, il faut admettre que ce soir Franky n'a pas l'air très à l'aise. Pour sa défense, être entourée d'adultes dans ce genre de fête est tout nouveau pour elle. Alors que l'androïde scanne la pièce pour essayer de comprendre le comportement qu'on attend d'elle, une Clara en colère et très ennuyée l'approche. Une fois aux côtés de leur papa Wilson, elle prend son air le plus dramatique possible et se met à soupirer si fort que les cheveux de Franky pourraient se détacher de son crâne.
"Bon, on peut y aller?"
"On vient d'arriver mademoiselle." répond Wilson avant de la chatouiller pour la faire rire. Ça à le mérite de la faire glousser quelques secondes, mais elle se remet vite à bouder.
"C'est même pas vrai, on est là depuis au moins trois heures."
"C'est pas vrai Clarita. On est ici depuis vingt-et-une minutes et trente-trois secondes."
Clara tire la langue, peu amusée par la correction de sa grande sœur.
"C'est une façon de parler, Franky."
"Archivé!" répond l'androïde avec son grand sourire habituel.
Avant que Clara n'ait le temps de se plaindre à nouveau, sa mère et un personnage ronchon qu'elle tient par le bras les rejoignent. Sofía a l'air toute joyeuse pendant que l'autre a le même air que d'habitude aux yeux de la petite Andrade: un air fatigué et fatiguant. Ennuyé et ennuyant. Clara se demande si c'est à ça qu'elle ressemble depuis qu'iels sont arrivéEs à la fête.
"Alors? Il a dit quoi Charlie?" demande Wilson en se rapprochant de sa femme d'une manière qui lui permet de garder ses distances avec Paul.
"Il voulait parler à Sofía."
"Charlie voulait nous féliciter pour Franky." clarifie Sofía après une petite pause. Elle lance un regard autour d'elleux puis baisse la voix. "Il a dit qu'on allait gagner la compétition si on continue comme ça. Aucun autre androïde ne lui arrive à la cheville. En tout cas pas maintenant."
Les épaules de Paul se raidissent malgré lui. Heureusement, il sait que personne ne va faire attention à ses mimiques, donc il ne craint pas être interrogé. Sofía le regarde dans les yeux en penchant la tête, et lui décide spontanément de regarder la table des en-cas derrière Wilson.
"Je vais être une star parce que ma sœur c'est la meilleure androïde de la Terre!"
Clara a crié tellement fort qu'on aurait presque entendu sa phrase faire écho dans l'immense salle des fêtes. Les deux scientifiques en face d'elle mettent un doigt devant leur bouche pour lui faire chut.
"Crie pas comme ça!" lui dit Paul. "Tout le monde sait pas que Franky est une androïde."
Clara lui jette un regard noir.
"Bah n'importe quoi. On est littéralement à E.GG, ça va ici j'ai le droit de dire."
"Ma puce," commence Sofía. "Ce soir il y a nos collègues mais il y a aussi leurs familles. Toi tu à le droit de savoir qui est Franky parce que c'est ta sœur, mais c'est pas pareil pour tout le monde. Tu comprends?"
"Oui oui... Et du coup Luz je peux le dire ou pas?"
Sofía ferme les yeux. Elle aurait vraiment du clarifier tout ça avant qu'iels n'arrivent ici.
"Non ma belette. Ce soir Franky et Luz sont des humainEs comme les autres."
Que Clara sache que Franky n'est pas humaine, c'est une chose. Mais que la petite Andrade soit au courant de la véritable identité de Luz, c'en est une autre.
Luz est unE androïde que l'entreprise E.GG a commencé à fabriquer quelques mois après le début du projet FR4NK13. Enfin, il serait plus correct d'attribuer la création de cetTE androïde au scientifique qui l'a mise au monde, M. Dominic. Il l'a crée dans le plus grand des secrets dans son bureau pendant des années, et cette affaire n'est connue de toustes que depuis quelques mois. Et puisque le bureau de M. Dominic se situe au deuxième étage de l'entreprise, et que tout androïde appartient contractuellement et avant toute chose à cette même généreuse entreprise...
Disons simplement que même si M. Dominic n'est pas là ce soir suite à un licenciement que beaucoup qualifieraient d'abusif, Luz pour sa part est restée au sein de l'entreprise qui compte bien l'élever au niveau de leur androïde star, Franky.
Un jour, alors que Luz était senséE être en mode repos dans son œuf à E.GG, l'ingénieuxE androïde a réussit par un quelconque moyen à s'enfuir et à rejoindre Franky jusqu'à son école. Personne n'a su déterminer pourquoi et comment Luz a pu réaliser cette évasion, et pourquoi c'est spécifiquement Franky qu'iel est alléE rejoindre.
De toute évidence, ce n'est pas un incident dont Charlie est très fier. Afin de couvrir l'affaire, il a prétendu devant tout le monde et sans la moindre trace de honte que c'était son plan depuis le départ, que Luz était prêtE à aller à l'école comme Franky et qu'il n'avait prévenu personne parce que... Et bien parce que c'est lui le patron et qu'il n'a pas à prévenir qui que ce soit avant de faire quoi que ce soit, et qu'il fallait arrêter de lui poser des questions maintenant parce qu'il avait pas encore signé les bulletins de salaire et qu'il fallait faire attention.
Mais malgré tous ses efforts, évidemment tous les employéEs de E.GG se sont passéEs le mot sur la réalité des faits. Et puis il ne faut pas être un génie pour voir ce qui se passe vraiment, de toute façon. Franky et Luz se voient comme deux androïdes complétement différent, presque opposéEs. Quand Franky se fait un tas d'amiEs à l'école, Luz de son côté agrandit sa liste d'ennemiEs chaque jour. Alors que Franky est la meilleure de la classe, Luz est tellement distraitE par un élève nommé Christian qu'iel ne fait que rendre copie blanche pendant les examens. Et là où Franky imite les émotions humaines comme la joie, la générosité ou l'empathie, Luz ellui ne semble retenir que l'hypocrisie, le mensonge et la manipulation.
Mais le patron aura toujours le dernier mot sur tout, et il ne compte pas admettre ou assumer ce qu'il s'est réellement passé, à savoir qu'il a laissé unE androïde s'échapper alors qu'il était en pause café. Alors pour l'instant, Franky et Luz iront à l'école ensemble, que ses employéEs le veuillent ou non.
En tout cas, même si Franky connaît la véritable identité de Luz en partie pour aider à ce qu'iel ne soit pas découverte à l'école, il n'était pas prévu que Clara le sache également. Si Charlie venait à apprendre que toute la famille Andrade connait son secret et donc son erreur, Sofía ne pourrait pas travailler tranquille pendant un bon moment.
Une fois assurée que Clara a bien compris les tenants et les aboutissants de l'affaire -sans rentrer dans tous les détails bien entendu, cette pauvre petite n'a que douze ans- Sofía se détend un peu. Mais voilà qu'elle doit régler autre chose.
"Il est où Paul?"
Ça fait même pas cinq minutes que je parle avec ma fille et il en a profité pour s'enfuir, se dit-elle. Je peux vraiment pas le quitter des yeux une seconde.
"Je sais pas mon amour." répond Wilson d'un air un peu trop détaché. "Je pense qu'il est parti voir où était Luz justement."
Encore des excuses, toujours des excuses. Malgré tous ses efforts, Sofía a l'impression qu'elle n'arrivera jamais à créer une entente entre sa famille et son partenaire. Elle soupire.
"Ça m'étonnerait, mais bon. Quand il sera revenu je vous présenterai mieux."
"Moi je le connais, merci." répond Wilson sans la regarder, en cherchant une poignée de gâteaux apéros sur la table derrière elleux. Plutôt bien pensé de sa part, car Sofía l'aurait sûrement fusillé du regard.
"Pourquoi tu veux le présenter maman? Ça va être gênant. En plus lui aussi il veut pas nous voir, t'as vu il est resté une seconde et il est parti."
"Oui, et moi je le connais déjà maman, ne t'embête pas. Toutes ses informations sont dans un dossier de mon système."
Franky penche la tête sur le côté et regarde dans le fond avec un regard vide. Clara agite sa main devant sa tête pour la reconcentrer, mais sa grande sœur se met juste à réciter:
"Paul Mejía, scientifique en robotique. Date de naissance: 6 décembre 1976. Ami de papa et maman depuis l'université, il..."
"Ça ira ma puce, t'es pas obligée de lire tout le dossier," la coupe Sofía. "Archive ça: si tu veux parler de quelqu'un, il faut que tu fasses des phrases naturelles avec les informations dans tes fichiers, d'accord? Tu peux pas juste le lire, ça s'entend dans ta voix."
"Archivé!"
"Mais maman vous le connaissez depuis l'université le voisin? Moi je l'ai jamais vu."
La phrase de Clara a comme réveillé des instincts de parent dans le cœur de Sofía. Elle a comme l'envie irrésistible de répéter une phrase qu'elle a toujours entendu à propos d'elle et qu'elle à maintenant le droit -et le devoir- de répéter à sa fille aujourd'hui:
"Tu sais, Paul te connaît depuis que t'es petite comme ça." dit-elle en mimant avec ses mains la taille d'un bébé, toute contente d'elle.
Wilson ne peut pas s'empêcher de sourire en la voyant comme ça, c'est plus fort que lui. Même s'il préférerait parler de littéralement n'importe quoi d'autre plutôt que de s'attarder sur cet individu désagréable, tous les souvenirs des premières années de sa fille remplissent maintenant son esprit.
"Oui bah moi je me rappelle pas du tout de lui, et il est même pas gentil avec moi."
"T'inquiète pas ma puce ça c'est normal." commence son père en riant. "Il est gentil avec personne."
"Wilson..."
"Quoi? C'est vrai, il a toujours été comme ça. Je sais pas pourquoi t'as mis dans le système de Franky que c'était aussi mon ami d'ailleurs, on a jamais été très potes."
Sofía sait pertinemment qu'il a raison, et c'est justement parce que c'est vrai et que ça le sera probablement toujours que ça l'attriste autant. Elle décide de ne pas nourrir ce fil de conversation qui prend une direction qui ne l'intéresse pas, et se tourne vers sa fille.
"Mais oui Clarita, on est amiEs depuis très longtemps et c'est pour ça que j'aimerai bien que..."
"Sofi, tu peux me rappeler le code du Wi-Fi s'il te plaît?"
"Tiens bah voilà, justement on parlait de toi."
"Hein?"
Paul lève ses yeux de sa tablette, abasourdit. Il n'est certainement pas venu la revoir pour discuter. En plus, l'idée que les Andrade parlent de lui dans son dos ne le réjouit pas vraiment. Qui sait quelles genres d'horreur iels sont en train de partager à son sujet.
"C'est bien ton anniversaire demain, non?" lui balance Sofía sans crier gare. À l'entendre, on croirait qu'elle a véritablement oublié cette information.
Franky prend cette question comme une interrogation sincère de sa maman, et récite donc une seconde fois le début de son fichier sur Paul, en faisant cette fois attention à faire des phrases plus "humaines" et naturelles. Paul se fige sur place en écoutant cette tirade. Il ne s'attendait absolument pas à ce que la situation tourne ainsi.
"C'est parfait ma puce." la félicite Sofía. "Donc tu viendras manger à la maison demain soir, hm?"
"Hein?" répète-t-il, incapable de réagir autrement face à cette situation absurde. "Je sais pas si j'aurais le temps..."
Paul continue à marmonner des phrases incompréhensibles, sans trouver d'excuse assez convaincante pour que Sofía lâche l'affaire. Il lui tend la tablette avec les paramètres du Wi-Fi ouvert sans dire un mot. Après avoir rentré le mot de passe, l'air pensif et ronchon de Paul se transforme en un... sourire? Enfin, quelque chose qui y ressemble. C'est comme si soudainement, l'idée de passer une soirée chez les Andrade était devenu le but ultime de son existence.
"Ha ha! Je rigolais, évidemment. Bien sûr que je vais venir Sofi, comment je pourrais refuser ça?" s'exclame-t-il en lui reprenant la tablette. "Bon, on se voit demain alors, j'ai des trucs à régler là-dessus."
"Tu peux pas faire ça demain? Me dit pas que Charlie est sur ton dos alors qu'on est pas au travail là."
En regardant autour pour voir si Charlie est en train d'appeler Paul histoire de lui lancer un regard assassin, Sofía remarque qu'elle est toute seule avec son ami. Wilson, Clara et Franky sont sur la piste de danse à quelques mètres, en train de s'enjailler loin d'elle... et surtout loin de Paul.
Sofía sait bien que Paul n'est pas très agréable avec tout le monde -c'est peu dire- et qu'il n'en a rien à faire des autres de manière générale. Elle ne va pas le forcer à faire ami-ami avec n'importe qui, ce serait trop chiant pour lui et ça servirait à rien de toute façon. Ça ne lui est jamais venu à l'esprit de lui faire un coup pareil.
Mais là c'est pas pareil, se convainc-t-elle.
C'est que Sofía le connaît un peu quand même, depuis le temps. Les deux se comprennent mutuellement d'une manière impossible à comprendre ou à expliquer. CertainEs leur inventeraient un destin écrit dans les astres, ou alors les qualifierait de deux âmes sœurs ou autre truc qui les dépasse.
AucunE des concernéEs n'en parlerait comme ça cependant, sûrement parce que c'est elleux-mêmes qui le vivent. Et aussi parce que même si c'était peut-être vrai avant, ça ne l'est plus du tout maintenant.
C'est vrai que leur relation est très différente ces temps ci, comparé à l'université. Sofía essaye tous les jours de se convaincre que rien n'a changé, mais elle sait très bien qu'elle entretient volontairement ce déni.
Déjà, à l'heure actuelle quand iels se voient c'est uniquement au travail, et iels ne parlent presque plus de leurs vies personnelles. Paul n'est jamais venu à leur ancien appartement, à part pour baby-sitter Clara en urgence une ou deux fois. Il s'est bien déplacé à l'hôpital pour sa naissance en laissant un petit cadeau à Wilson histoire de, mais ce ne sont pas ses occasions qui vont faire que Clara va se souvenir de lui.
À la fac, quand iels passaient un tout petit week-end séparéEs, iels s'envoyaient des messages tout du long par robot volant interposé. Bon, en réalité ça a du arriver une ou deux fois, la majorité du temps iels allongeaient juste la facture de téléphone de leurs mamans. Une fois, Brigitte en a eu tellement marre qu'elle a carrément coupé sa ligne aux ciseaux pour que son Paulito arrête de parler à cette satané Sofía. Du coup pour contourner le problème, son fils s'est mis à inventer un gadget pirate pour pouvoir continuer à appeler son amie en paix.
Mais voilà, ça fait des années que même si iels ne se voient pas pendant deux semaines de vacances, personne n'appelle l'autre. Alors que ce sont elleux qui payent leurs factures, que leurs téléphones sont maintenant à l'épreuve des ciseaux, que la mère de Paul n'est pas sur leur dos, et qu'iels pourraient juste choisir de passer leurs vacances ensemble comme avant.
Alors quand Charlie a annoncé à Sofía qu'elle et sa famille allaient devoir déménager pour garder le secret de Franky, elle s'est dépêché de vérifier s'il ne restait pas un appartement de fonction dans le même immeuble que Paul. Elle s'attendait à ce qu'il proteste, mais après réflexion il a beaucoup aimé l'idée et ça lui a fait tellement plaisir qu'elle aurait pu s'envoler.
En deux semaines, les choses ont déjà un peu bougé. Paul passe chez eux de temps en temps le matin pour prendre un café et parler de leur Franky. Quelques soirs il est même venu dîner, sans jamais rester trop longtemps certes mais c'est déjà une énorme amélioration.
Si elle avait su qu'il suffisait juste de faire unE androïde avec Paul pour que tout redevienne comme avant, elle lui en aurait parlé beaucoup plus tôt.
Donc certes, plus de Paul à la maison c'est super c'est génial, mais ça veut aussi dire qu'il est obligé de parler à Wilson et vice-versa. Et si d'un côté Sofía et Paul doivent réapprendre à être en symbiose après cette drôle de semi-séparation, d'un autre côté Wilson et Paul n'ont pas bougé d'un millimètre depuis l'université.
Il y a des gens qui ne s'aimeront jamais, c'est comme ça c'est la vie. Sofía aurait juste aimé que ça ne lui tombe pas dessus. C'est difficile pour elle de naviguer avec ces deux-là qu'elle aime plus que tout, mais qui de leur côté ne peuvent pas se voir en peinture.
Pour Clara c'est autre chose. Ça chagrine un peu Sofía certes, mais en même temps Paul ne l'a pas vu grandir. Clara ne se rappelle même pas de lui, pour elle c'est juste le voisin relou d'en face, c'est plutôt normal de son point de vue qu'elle ne l'aime pas trop.
Mais voilà, malgré tout Sofía continue d'espérer que ses rêves vont finir par se réaliser. Elle aimerait juste que les autres Andrade puissent voir Paul comme elle le voit, et que Paul puisse voir les Andrade comme elle les voit. Elle aimerait imposer sa vision à tout le monde pour régler tout ça en deux temps trois mouvements. Si seulement c'était possible.
Parce qu'à l'heure actuelle les gens autour n'ont pas l'air de comprendre que Paul fait partie des personnes les plus importantes de sa vie. On va même jusqu'à lui dire de se méfier de lui, ce qu'elle ne comprend absolument pas. On lui répète qu'il a l'air de manigancer des trucs soit contre le labo soit contre elle, ce qui est évidemment complétement absurde.
Ce qu'il faut comprendre, c'est que quand Paul la regarde et lui parle, il le fait de la même manière qu'il y a vingt ans, malgré toute la distance qu'il met entre elleux-deux. Le même entrain, la même passion, c'est tout pareil. Les conversations sont plus courtes et sont orientés uniquement sur les projets et les prototypes certes, mais cet aspect là n'a pas changé.
Sofía regarde son ami avec un sourire. Elle aimerait bien parler avec lui de tout et de rien, mais ses yeux restent rivés sur sa tablette. Et quand elle s'approche, il recule en arrière comme un cachotier. De quoi il pourrait bien avoir peur?
De quoi il pourrait bien avoir peur...
La réalité, c'est que ça fait sept ans que Paul manigance des trucs contre le labo et contre elle. Ça fait vingt ans qu'il est persuadé que Sofía ne le voit que comme un bon-à-rien qui ne mérite pas d'être dans son entourage avant d'avoir prouvé de quoi il était capable.
Les souvenirs de l'université manqueraient sûrement à Paul s'ils ne se fanaient pas en fleurissant. C'est bien plus simple d'être concentré sur son travail et son Roby s'il se dit que Sofía est juste une collègue du boulot qu'il devrait inventer si elle n'existait pas.
La pauvre tablette de Paul se fait taper dessus un peu trop méchamment. Sofía se rend bien compte qu'elle ne va pas réussir à le faire quitter ce truc cinq minutes, ce qui la fait souffler d'agacement.
La collègue jette l'éponge pour ce soir.
Demain est un autre jour, pense-t-elle.
"Sofía!" s'écrie une voix familière. "Je cherche mon bracelet, celui que je porte tout le temps au poignet, tu l'aurais pas vu?"
L'intonation de Luz est juste, on ressent bien la panique dans sa voix, cependant son corps et son expression faciale ne transmettent absolument pas la même émotion. Son visage est radieux, et iel sourit comme si on venait de lui faire un très beau compliment. C'est quelque chose sur lequel Sofía aimerait travailler avec Luz, mais la scientifique n'a évidemment pas le temps de s'occuper d'unE autre androïde quand prendre soin de sa fille occupe déjà tout son emploi du temps.
"Et pourquoi on saurait ça, petitE?" demande Paul qui n'a pas levé les yeux de sa tablette depuis qu'iel est arrivée.
Il y a une acidité dans sa voix que Sofía a du mal à expliquer. N'importe qui d'autre ne s'arrêterait pas là-dessus, étant donné que Paul traite toujours ses interlocuteurices comme si c'étaient ses pires ennemiEs.
Mais Sofía n'est pas n'importe qui, et dès qu'il parle avec Luz elle voit bien qu'il lui en veut vraiment personnellement, comme si iel lui avait fait quelque chose de grave. À part affecter un peu la trajectoire de Franky, que Paul a aidé à faire naître et continue à suivre, Sofía ne comprend pas vraiment ce que la présence de Luz a à faire avec lui. Il faudra vraiment qu'elle lui demande, à l'occasion.
"Désolée Luz, ça me dit rien non plus." répond Sofía après avoir regardé rapidement dans ses poches et dans son sac. "Quand est-ce que tu l'as vu pour la dernière f..."
Mais Luz a déjà filé à la vitesse de la lumière... Plus le temps passe, et plus la liste de comportements qu'elle aimerait arranger chez Luz s'allonge. La situation de cetTE androïde qui passe ses journées à l'école pour ensuite rentrer à E.GG toutE seulE dans sa chambre, loin de son créateur et sans famille pour prendre soin d'ellui l'inquiète de plus en plus. Un jour elle aura le courage -et le temps, surtout- d'en parler à Charlie.
Maintenant qu'elle a abandonné l'idée de réunir ses personnes préférées, et qu'elle a la confirmation que Paul viendra fêter son anniversaire à la maison demain soir, Sofía relâche enfin toute la tension présente dans son corps. Elle laisse son ami faire ses affaires sur sa tablette et rejoint sa famille sur la piste de danse.
Après quelques chansons, Wilson lui tend la main avec un sourire. Des notes très familières font écho dans la pièce, et les deux se jettent dans les bras l'unE de l'autre. Clara se cache les yeux et crie son dégoût. À ses yeux rien n'est plus malaisant ou gênant que voir ses parents être fleur bleue devant elle.
Franky remarque sa gêne, et la tire par le bras pour qu'elles s'éloignent un peu.
"C'est la chanson de leur première rencontre." explique-t-elle à sa petite sœur. "Papa a demandé au DJ de la rajouter dans la playlist."
En prêtant attention aux paroles, Clara se demande s'il existe sur cette Terre une chanson plus gnagnante et sentimentale que celle-ci. Mais malgré elle, elle n'arrive pas à être réellement embarrassée en voyant comme ses parents ont l'air heureusEs à danser ensemble comme ça.
"Je savais même pas qu'iels se connaissaient depuis l'université." dit-elle en repensant à ce que Franky a récité tout à l'heure. "Ça veut dire qu'iels ont dansé comme ça entre les cours?"
"Pas entre les cours. C'était pendant l'anniversaire de maman." explique Franky. "Il y a dix-neuf ans, elle a organisé une fête, il est venu et iels ont dansé ensemble comme ça sur cette chanson."
"...et du coup le voisin il était là?" demande Clara.
"Oui. Il a rencontré maman un an, trois mois et vingt-sept jours avant ça."
Franky de met ensuite à lire minutieusement les fichiers de son système à sa sœur, qui est devenue soudainement très intriguée par la vie passée de ses parents. Ça lui paraît très curieux d'imaginer un temps avant qu'elle ne soit venue au monde.
Dès que "Nuestra historia de amor" se termine, Wilson se rapproche de ses filles avec les bras tendus pour les ramener sur la piste. Mais Franky lui agrippe le bras sans maîtriser sa force surhumaine, ce qui le fait grimacer de douleur. Puis sans le vouloir, elle se met à le faire tourner sur lui-même comme une toupie, avec beaucoup trop de vitesse pour un simple humain.
Cette tournure des événements imprévue surprend Wilson, qui lâche subitement la main de sa fille par peur de lui faire mal. La force de l'action le fait chuter en arrière et le fait bousculer tout un groupe de danseureuses qui se mettent à tomber à leur tour comme des dominos.
Franky est mortifiée.
"Papa, je suis désolée! J'ai pas fait exprès je le promet, j'ai pas contrôlé ma force et..."
"T'inquiète pas ma belette," dit-il entre deux toussotements, en essayant de sourire pour la rassurer. "Je savais pas que tu avais autant de force!"
Sofía court vers son mari et vérifie que tout va bien. Elle l'aide à se relever et voit qu'il tient debout sans problème et que rien n'a l'air cassé. Les personnes autour se relèvent lentement et lèvent leurs pouces pour indiquer que tout va bien également. Sofía se rapproche finalement de Franky, en sortant sa tablette de son sac pour vérifier l'état de son système.
"On va vérifier ce qui t'arrive mon cœur, t'inquiète pas c'est pas ta faute."
Franky semble ne plus avoir d'énergie pour répondre, malgré la jauge de sa batterie qui indique 73%. Sofía remarque quelque chose dans son logiciel. Elle éteint la tablette et prend doucement le bras de sa grande fille.
"On va y aller."
Après avoir dit au revoir à tout le monde en s'excusant pour ce qu'il s'était passé, les Andrade s'éclipsent vers le parking. Avant de sortir, Charlie les intercepte, pile poil ce que Sofía voulait éviter. Son chef n'était pas sur la piste quand tout le monde est tombé, et il a l'air plus confus qu'en colère. Charlie demande des explications à Sofía, qui sans s'arrêter lui promet d'écrire un rapport complet demain à la première heure.
"T'es sûr que tout va bien chéri?" demande Sofía une fois que tout le monde est installé dans la voiture.
Wilson lui lance un sourire du siège passager à sa droite.
"Bien sûr, plus de peur que de mal. Après une bonne nuit de sommeil, tout ira bien."
Sofía pose sa main sur la sienne, puis s'attache et démarre la voiture. Sur la banquette l'arrière, Clara cherche les mots justes pour rassurer sa grande sœur. Elle n'arrive pas à voir l'androïde derrière la pluie de cheveux noirs qui cachent son visage.
"Franky? Franky... C'est pas grave, tu sais."
"C'est pas ta faute ma puce" la rassure encore une fois Sofía en regardant rapidement dans le rétroviseur.
"T'inquiète pas Franky, je te promet que je vais bien! Il en faut plus pour faire du mal à ton vieux père tu sais." dit-il en riant, ce qui apaise un peu Franky. "Je suis sûr qu'il y a eu un bug dans ton système, c'est pas ta faute."
"Oui mais... Si je connaissais mieux ma force..."
"Je regarderai ça mieux tout à l'heure, mais sur ma tablette j'ai vu que tes limites de force ont été modifiés. Tu ne pouvais pas savoir, pour toi ce niveau de force était normal alors que pas du tout."
Wilson ricane.
"Exactement. À partir du moment ou quelqu'un joue avec ta programmation, t'y es pour rien ma belette."
"C'est sûrement une erreur de ma part." corrige Sofía. "Je vois pas qui voudrait que ce genre d'incident arrive ce soir."
"Moi je vois bien quelqu'un..."
Il fait trop sombre à l'arrière pour bien voir les visages des adultes de devant, alors Clara ne comprend pas pourquoi ses parents ont subitement arrêté de parler.
Clara pose sa main sur l'épaule de Franky, et l'androïde lève enfin la tête pour la regarder.
"T'inquiète pas, moi papa je le fais tourner en bourrique tous les jours hein."
Sur ce point tout le monde est d'accord.
Le petit-déjeuner du lendemain matin est anormalement silencieux. Au lieu de manger virtuellement comme tous les matins, Franky ne fait que tourner sa cuillère dans son bol vide avec un air triste. Cette scène fend le cœur de son père et de sa sœur.
"Qu'est-ce que tu manges ce matin Franky?" demande Clara avec un petit sourire.
Franky regarde son bol vide. Son système est tellement rempli de tristesse qu'il n'a même pas généré de filtre pour lui donner l'impression qu'elle mangeait comme les humainEs. Elle regarde l'assiette de tartines de sa sœur et ressent une émotion qu'elle est incapable de nommer.
Les humainEs mangent des vraies tartines, et les humainEs n'ont jamais de bugs de système.
Pour tenter de se défaire de cette émotion sans nom, son regard se tourne vers la chaise vide à sa droite.
"Maman mange pas avec nous?"
"Non maman travaille aussi le samedi mon cœur." répond papa. "Elle est partie au travail très tôt ce matin."
Franky ne peut pas empêcher son système de former des hypothèses et des déductions à l'entente de cette phrase. Et si maman avait été obligée d'aller très tôt au travail par sa faute? Peut-être que Charlie est actuellement en train de la réprimander, tout ça parce que...
"Bonjour toute la famille!"
Wilson saute de sa chaise. Qu'est-ce que c'est que ça encore. Il se retourne en vitesse pour faire face à la porte d'entrée, sous les rires en cascade de Clara.
"Luz, combien de fois je dois te dire que tu dois toquer avant d'entrer?"
"DésoléE monsieur Wilson. Je vais l'archiver cette fois." dit-iel avant de changer d'interlocuteurice une seconde plus tard. "Bonjour Franky, tu vas faire quoi aujourd'hui? Tu vas voir Chris, tu passes la journée avec Chris?"
On dirait qu'un peu de joie de vivre revient un peu dans les yeux de Franky lorsqu'elle entend ce nom. Clara se demande comment est-ce que sa mère a fait pour que les yeux de sa sœur androïde brillent comme ça. Est-ce qu'il y a des réservoirs à paillettes sous ses paupières?
"Oui! Je vais aider Chris et Delfina au Cyber cet après-midi, parce que Margarita n'est pas là."
"Super, alors je viens avec toi!" sourit Luz. "Je dois retrouver mon bracelet que j'ai perdu hier, je l'ai peut-être laissé là-bas?"
"Alors c'est décidé, on va aider Chris et Delfina en cherchant ton bracelet. Je te promet qu'on va le retrouver."
Franky se lève, prend les mains de Luz dans les siennes et lui offre un sourire. Le regard de Luz se fige sur leur point de contact, comme si iel ne comprenait pas la raison de ce geste.
"OK!" s'écrie-t-iel après s'être libéréE de Franky. "Alors à tout à l'heure, je vais rejoindre Chris!"
Luz file sans demander son reste, laissant une traînée de poussière derrière ellui. Un éternuement échappe Wilson, qui regarde la porte grande ouverte avec dépit. Il va vraiment falloir que quelqu'un apprenne les bonnes manières à cetTE androïde.
Une fois la porte refermée, Wilson revient vers ses filles pour les aider à débarrasser. Enfin, c'est surtout Franky qu'il aide, étant donné que Clara semble occupée -comme par hasard, au moment où il faut ranger la table- par un petit objet dans ses mains.
"Clarita, arrête de jouer et aide ta sœur."
"Je peux tout faire, papa. Ce n'est pas compliqué pour moi de ranger la table, tu sais."
"Oui je sais Franky, mais Clara doit apprendre à participer et..." il s'arrête. Quelque chose semble avoir attiré son attention. "Clarita, qu'est-ce que c'est que ça?"
"Hein? Rien."
Aussi rapidement qu'unE androïde, Clara range l'objet dans la grande poche de son pantalon. Puis, comme si son père avait la mémoire d'un poisson rouge, elle se met à ranger son assiette sagement et innocemment.
Malheureusement pour elle, Wilson connaît sa fille comme s'il l'avait faite...
"Mademoiselle, tu vas me sortir ce que tu viens de mettre dans ta poche immédiatement."
"Mais c'est rien papa. C'est un cadeau pour toi en plus, je veux pas que ça te spoile."
"Clara, dépêche toi."
Ne nous détrompons pas. Wilson est et sera toujours le plus naïf et crédule face aux mensonges de sa petite Clara. Mais aujourd'hui, il a décidé qu'il ne lâcherait pas l'affaire.
"Haaan!" s'exclame Franky lorsqu'elle voit l'objet que tient sa petite sœur au creux de sa main.
"J'ai pas fait exprès!"
"Comment ça t'as pas fait exprès? Tu vas me dire que le bracelet de Luz s'est retrouvé dans ta poche par hasard?" s'écrie Wilson.
L'assurance de Clara s'évanouit aussitôt. Elle est habituée aux réprimandes de sa mère, de son père un peu moins.
"Oui! Fin heu..."
"Clarita, voler c'est mal. Tu dois le rendre à Luz, et tu dois t'excuser." dicte Franky comme si elle récitait quelque chose. "Quand on fait du mal à quelqu'un, il faut s'excuser."
"Exactement, écoute bien ta sœur. Pourquoi tu lui as pris?"
"J'ai fait ça pour protéger Franky! Iel est super bizarre Luz et iel garde tout le temps son bracelet. Je suis sûre qu'iel fait des trucs chelous avec."
Clara garde le bracelet fermement dans ses mains et commence à l'inspecter comme si de rien était. Wilson tend sa paume ouverte devant les yeux de sa fille.
"Rends le tout de suite."
"D'abord je dois voir si c'est pas dangereux."
"Même si c'est dangereux c'est pas à toi de voir ça. Dépêche toi de le rendre."
Wilson perd patience et chope le bracelet des mains de sa fille. Mais Clara ne veut vraiment pas le lâcher et se met à le tirer vers elle avec toute sa force. Les deux commencent donc leur gue-guerre pour savoir qui le récupèrera.
Voyant la situation dégénérer, Franky décide de se mettre entre elleux pour calmer le jeu. Mais à peine arrive-t-elle à leur côtés qu'une intense lumière bleue s'échappe du bracelet.
Un immense portail circulaire apparaît devant elleux. Un tas de couleurs tourbillonnent à l'intérieur, et leur danse infinie est si rapide que ni cerveau ni système d'exploitation ne sont capable d'en faire sens.
Tout se passe très vite.
En une seconde, il n'y a plus personne chez les Andrade.
"Ahh, je suis trop vieux pour ces c..."
"Papa! Ça va?" crient Franky et Clara en même temps, accroupies toutes les deux autour de Wilson.
Leur papa allongé sur le sol ne peut pas s'empêcher de rire en les voyant comme ça. Elles ont l'air tellement inquiètes ses pauvres pitchounes. Rassurées par son fou rire, elles décident de lui faire un gros câlin.
"Ça va ça va... Par contre deux fois ça va mais la troisième fois bonjour les dégâts." dit-il en se remettant debout avec l'aide de Franky. "Demain je vais rien faire à part dormir."
Une fois debout, les trois regardent autour d'elleux. Au lieu de la pièce de vie de leur appartement, la seule chose que les Andrade voient est une... rue. Une rue dans un quartier qui ne leur est pas du tout familier, en plus de ça.
"C'est le bracelet qui a fait ça?" se demande Wilson. "Tu vois Clarita, je t'avais dit de pas jouer avec les affaires des autres."
"Franky, tu peux analyser où on est?" lui demande Clara pour changer de sujet.
"Mademoiselle, écoute moi b..."
"Bien sûr." sourit Franky. "Analy..."
Franky arrête subitement son train de parole, et se met à regarder dans le vide comme elle le fait quand elle cherche quelque chose dans son système. Wilson et Clara ne commencent à s'inquiéter que lorsqu'une voix qui ne ressemble pas à celle de Franky s'exprime avec sa bouche.
"Réseau sans ligne introuvable. Activation du kit sans réseau. Chargement en cours. 10%... 30%..."
"Comment ça pas de réseau?" s'écrie Clara en tapotant ses mains sur toutes ses poches sans rien trouver. "Merde j'ai même pas mon téléphone!"
"Clarita, pas de gros mots."
Wilson l'a dit sans même lever la voix, trop occupé à scruter Franky pour essayer de comprendre ce qui lui arrive. Une fois le chargement terminé, l'androïde semble revenir à la normale.
"Qu'est-ce qui se passe ma belette?"
Franky cligne des yeux quelques fois, puis regarde Wilson de haut en bas très lentement avant de faire de même chose avec Clara. Une fois cela fini, elle secoue tout son corps de gauche à droite comme elle le fait quand elle est heureuse.
"OK! Mon kit sans réseau semble fonctionner parfaitement. Maman l'a programmé dans mon système pour que je puisse fonctionner même sans connexion. Il m'a juste fallu un moment pour le charger."
"D'accord." répond Wilson, qui doit faire un sacré effort de concentration pour tout comprendre sans Sofía à ses côtés. "Est-ce qu'il y a des choses que tu peux pas faire sans réseau? Est-ce que tu as besoin d'aide pour quelque chose?"
"T'inquiète pas papa." lui assure sa fille. "Je peux pas chercher sur internet des informations sur les interactions humaines par exemple, mais si je reste avec vous ça devrait pas poser problème. Et j'ai déjà enregistré beaucoup de fichiers vidéos dans ma mémoire. Sinon, j'ai tout ce qu'il faut pour fonctionner normalement: un dictionnaire, des tutoriels, tous les numéros de téléphone importants..."
Wilson sourit. Sa femme est vraiment une scientifique extraordinaire.
"Donc ça veut dire que tu peux pas analyser où on est... Est-ce que t'as une carte de la ville?" demande Clara.
"Oui. Mais je ne peux pas vous dire où on est sur la carte."
"C'est pas grave ma puce, on peut toujours demander aux gens. On faisait comme ça avant internet."
Il attend une réaction cinglante de Clara qui le juge toujours très fort quand il dit ce genre de trucs, mais elle ne sort pas. Sa fille est trop occupée à appuyer sur toutes les parties du bracelet avec force.
"Qu'est-ce que tu fais? On a dit que c'était dangereux."
"C'est pour revenir à la maison! Vous avez bien vu que le truc s'est activé que quand on se batt... Heu quand on a appuyé dessus sans faire exprès du tout sans le vouloir. Alors j'essaye de re-appuyer pour voir."
"Lâche ça, tu vas te faire mal. On va demander à quelqu'un où on est, OK?"
"Mais papaaa tu vois bien que Luz iel est super bizarre, pourquoi iel a un bracelet qui permet de se téléporter? Je l'aime vraiment pas cellui-là."
"C'est mon amiE, et je suis sûre qu'il y a une explication à ce qui nous arrive Clarita." défend Franky avant de chercher quelque chose dans ses fichiers. "C'est normal pour les humainEs de se téléporter?"
"Non belette, c'est pas normal du tout..."
Wilson tend sa main vers Clara comme tout à l'heure pour qu'elle lui rende le bracelet, et cette fois-ci elle accepte de lui donner à contrecœur.
"Pas de panique vous deux, papa est là et on va rentrer à la maison."
Les Andrade partent donc à la recherche d'unE passantE qui pourrait leur indiquer où iels sont. Mais après à peine dix mètres de marche, Clara se remet à crier.
"Clarita, j'ai dit..."
"Nan mais! Regarde là-bas!"
Clara pointe son doigt vers une personne, et Wilson appuie gentiment sur son bras pour qu'elle le baisse. La personne désignée est bien trop loin pour que Wilson comprenne ce que sa fille essaie de lui dire.
"Hé mais c'est Paul!" s'écrie Franky. "Papa, on a qu'à lui demander à lui!"
Avant même qu'il ne puisse répondre quoi que ce soit, Wilson se fait tirer par ses filles par les deux bras. Il se demande vraiment ce que Paul fait ici alors que l'endroit où iels sont ne ressemble absolument pas à leur quartier. À tous les coups il est encore en train de préparer un de ses coups douteux se dit-il.
"Bonjour Paul, comment ça va la famille?" salue Franky.
Paul fronce les sourcils à l'arrivée de l'androïde, et son air devient encore plus confus quand il voit Wilson s'approcher.
"Vous êtes qui vous?" demande-t-il en soupirant. "Je suis pas Paul je suis Segundo, son frère. Et de toute façon il est pas à la maison."
Comment ça son frère, se demande Wilson. Aux dernières nouvelles Paul n'a pas de frère qui lui ressemble comme deux gouttes d'eau. Segundo il a dit? Est-ce que c'est une technique nulle pour faire comme s'il ne les reconnaissait pas? Le coup du jumeau? Le coup du jumeau qui s'appellerait "Segundo"?? Il est pas croyable ce type.
Bien que, maintenant que Wilson examine l'individu avec attention... Il se rend compte que Paul a comme rapetissit, ou plutôt rajeunit d'ailleurs. Et puis il ne porte même pas de lunettes alors que Wilson est sûr et certain qu'il ne sortirait jamais sans.
"On est des amiEs à Paul," répond Clara, qui semble se tourner les méninges en regardant son interlocuteur.
"Segundo" se met à examiner chaque Andrade lentement. Devant lui se tiennent deux fillettes et un adulte d'au moins quarante ans. Iels ne semblent pas vraiment rentrer dans la définition "amiEs de Paul". Et bien qu'il ne dise rien, Wilson n'en pense pas moins.
"Des 'amiEs' de Paul, bien sûr. D'où ça?"
"De..." réfléchit Clara. "De l'université!"
"Vous êtes pas un peu jeunes pour aller à l'université? Je crois pas qu'iels acceptent des gamines de douze an en première année."
"Non mais me regarde pas moi, n'importe quoi. Franky, il croit que je pourrais aller à l'université ha ha ha." rigole Clara.
Franky la rejoint en sortant son rire forcé qu'elle fait quand elle imite les gens rire. Cela met "Segundo" encore plus mal à l'aise qui ne l'était déjà. Clara pointe vers son père, qui n'a rien dit depuis le début. Il se tait en partie car il a confiance dans les talents de menteuse de sa fille, et en partie parce qu'il n'a pas l'énergie de rentrer dans le jeu bizarre de Paul.
"Évidemment ce cher monsieur est... professeur à l'université." tente Clara avec les yeux plissés. "Il doit vraiment lui parler et c'est pour ça qu'on le cherche. Et comme on est ses filles préférées on a décidé de l'accompagner, voilà!"
Malgré les talents d'actrices inégalés de Clara, "Segundo" ne flanche pas. Il a même l'air encore plus en colère que tout à l'heure.
"Bon de toute façon comme j'ai dit tout à l'heure Paul est pas là. Vous avez qu'à téléphoner ou je sais pas moi, pourquoi vous vous déplacez chez les gens pour ça? Maintenant oust ou je préviens ma mère et ça va pas vous plaire." lâche-t-il avant de se retourner. "Et bonne journée."
Le supposé second rentre chez lui en claquant la porte si fort qu'elle pourrait exploser sur place, puis ferme la serrure à double, triple tour. Bon, ça au moins c'est quelque chose qui leur est à toustes plutôt familier.
Face à cette porte fermée, ce quartier inconnu et ce "frère de Paul" qui n'avale aucune couleuvre, les Andrade n'ont rien d'autre à faire que de se regarder en hochant les épaules.
Luz devrait être avec Chris, iel devrait être avec Chris, iel devrait être avec Chris!
Le Cyber c'est pas dans cette direction! Malgré tous ses efforts, rien ne peut contrecarrer la foutue puce que lui as mis Charlie. Avec cette saloperie il peut savoir où iel se trouve à n'importe quel moment. La puce lui permet même d'enclencher à distance le programme "Ramène Luz à la maison".
Ça fait des jours qu'iel demande à Dóminus qu'il désactive cette horreur et il fait toujours comme si c'était super dur, tout ça parce que ce serait une technologie archaïque pour un androïde comme lui ou d'autres excuses bidons.
De toute façon quoi qu'il arrive à Luz, c'est toujours de sa faute à ellui et jamais de la faute des autres. Donc si Charlie ne lia lâche pas, dans la logique du grand schtroumpf c'est de sa faute. Et que bah en fait oui mais il fallait faire plus attention et qu'on est des androïdes du futur donc on est meilleurEs que les humainEs et tout et tout...
"Luz, pourquoi tu n'es pas dans ta chambre?" demande Charlie, télécommande en main.
Évidemment, il a fallu que sa merde fonctionne avec une télécommande comme si Luz n'était qu'une vulgaire télé ou un vieux store.
"Parce que je veux voir mes amiEs!" répond-iel. "C'est bien non, je suis super humainE je veux sortir avec mes amiEs le week-end. Super pour le concours ça."
"Me répond pas sur ce ton. Tu sais très bien que tu peux pas sortir sans mon autorisation et celle de Mme. Durán. Heureusement qu'elle m'a laissé la zapette pendant son jour de congé."
Luz maudit cette foutue Durán quelques fois dans sa tête avant de se focaliser sur la télécommande. Avec un simple geste de la main invisible à l'œil nu du patron de E.GG, iel pourrait...
"708, je peux savoir pourquoi tu as fait un voyage dans le temps non autorisé?"
Ce serait dommage de pas se faire engueuler par deux personnes en même temps. Malheureusement ou heureusement, iel y est tellement habituéE maintenant que ça ne l'affecte même plus. Ça fait même pas un mois qu'iel est là et son quotidien est déjà catastrophique.
"Bonjour Dóminus. Je n'ai pas fait de voyage dans le temps je suis actuellement face à Charlie, comme tu peux le voir."
Leurs appels peuvent se passer de système à système, ce qui permet à Dóminus d'accéder à la vision de Luz. Normalement iels utilisent un autre moyen pour s'appeler, mais actuellement le moyen en question est perdu on ne sait où. Le plus probable c'est que quelqu'un lui ait volé hier durant la fête, après un énième appel catastrophe avec son chef dans les toilettes. De rage, Luz a balancé son bracelet sur le mur carrelé à la fin de la communication et a quitté les toilettes pour se calmer les nerfs plus loin.
Seulement à son retour, le bracelet n'était plus là.
"Je le vois bien, d'ailleurs répond lui avant qu'il ne pense que tu es insolentE."
"Je vais rentrer Charlie, pas besoin de me menacer." concède-t-iel avant de rentrer dans le grand bâtiment.
Charlie est le cadet de ses soucis par rapport à Dóminus. Aujourd'hui, iel va profiter du fait qu'iel n'appelle pas son céruléen chef avec le bracelet. Pendant qu'iel rentre dans E.GG pour aller dans sa chambre, Luz décide de gagner un peu de temps.
"Hein? J'entends plus Dóminus, je capte suuper mal dans ce bâtiment je pense qu'il est isolé pour que les androïdes ne puissent pas communiquer!"
"Alors appelle moi avec le bracelet!"
"Le quoi? Vraiment j'entend rien du tout, à pluus!"
Luz raccroche sans aucun remord mais non sans peur. Le répit sera court mais c'est déjà ça de pris honnêtement. Ça ne va pas faire plaisir à l'androïde tout bleu qu'iel coupe comme ça, mais Luz n'a pas besoin qu'il lui rappelle toutes les cinq secondes que le bracelet c'est important pour qu'iel le comprenne. C'est bien parce qu'iel sait à quel point il est important que Luz se tue à la tâche depuis hier pour retrouver le foutu bijou.
C'est pas parce que tu me répètes en boucle que je rate tout ce que je fais que je vais miraculeusement me mettre à tout réussir, connard.
En rentrant dans sa chambre et en voyant qui sursaute quand iel ouvre la porte avec fracas, Luz se demande ce qu'iel a donc fait pour mériter ça. Dans sa tête résonne comme un "Pourquoi tout ça n'arrive qu'à moi?"
"Luz! Pourquoi t'étais pas dans ta chambre? On est samedi, y'a pas cours."
Nan, jure? C'est qui l'ordinateur ici déjà?
"Paul, qu'est-ce que tu fais dans ma chambre?"
"J'ai pas de comptes à te rendre petitE. Charlie se faisait un sang d'encre pour toi. J'étais en train de vérifier qu'il ne t'était pas arrivé un truc à cause d'un malfonctionnement de ton œuf ou quelque chose comme ça."
Maintenant que Luz y pense, sans détrôner Charlie qui est quand même le king des relous, Paul est vraiment de plus en plus suspect avec ellui. Ce scientifique raté est constamment en train d'épier ce que Luz fait, et Franky a bien trop de bugs dans son système pour que ce soit seulement dû a des erreurs de code de Sofía.
Bon certes, plus Franky a de bugs et plus sa relation avec Chris se détériore donc ça arrange plutôt ses affaires... Mais il ne faudrait pas que ses plans malveillants deviennent incontrôlables. En réalité Luz n'a aucune preuve qui atteste que c'est bien Paul qui joue avec Franky pour la discréditer, mais il faut admettre que son air malintentionné et sa tendance à ricaner en toutes circonstances n'aident pas son cas.
En pensant à tout cela, Luz se dit qu'il y a un monde où c'est Paul qui lui a volé le bracelet pendant la fête d'hier soir. Il va falloir qu'iel paye une petite visite au laboratoire secret que le scientifique cache derrière ses étagères dès qu'iel en aura l'occasion.
Ce serait beaucoup plus rapide de lire dans les pensées de Paul pour confirmer toutes ses suspicions sur lui, et iel n'arrête pas de le tenter. Malheureusement, même si cette fonctionnalité existe dans son système, iel n'arrive pas à s'en servir. Dóminus lui a expliqué qu'il fallait un certain lien avec la personne pour que ça marche. Mais personne n'aime Luz, alors...
Luz pensait à tord s'être un peu rapproché des Andrade à force de passer du temps avec elleux, mais plus tôt iel n'a pu lire ni dans les pensées de Clara ni celles de Wilson pour savoir si iels n'avaient pas son bracelet. Clara et Paul se ressemblent un peu, dans le sens où les deux sont malicieux et adorent mentir. La petite Andrade faisait partie de la liste des suspects, mais Luz n'a pas pu confirmer si c'était elle ou non qui lui a volé sa précieuse machine à voyager dans le temps.
...Et dire qu'à la base iel est dans le passé pour détruire une pauvre relation romantique. Comparé au reste, sa mission d'origine paraît simplissime.
J'aurais préféré être dans un monde où mon seul problème à régler serai d'éloigner Christian et Franky... Qu'est-ce que ça aurait été facile de ne penser qu'à ça, se dit-iel. Comme ça en deux trois temps mouvements Luz aurait su qui était san créateurice, et serait retournéE en 2035 à ses côtés.
"Tout mon équipement va bien, et de toute façon s'il y a un problème c'est mon système qui est au courant en premier." répond-iel à Paul sans la moindre once de politesse ou de respect. "Tu peux me laisser seulE maintenant s'il te plaît?"
Démasqué, Paul se relève en vitesse et récupère son petit matériel. Juste pour le faire chier un peu, Luz décide de lui agripper le bras histoire de lui prendre un peu d'énergie. Et puis ça tombe bien, sa batterie n'est qu'à 40%.
Mais avant qu'iel ne puisse satisfaire sa vengeance à deux balles, et comme pour continuer sa série de malchances depuis hier, quelqu'un d'autre rentre dans sa chambre. Cette fois-ci au moins la personne qui les approche est une scientifique qui lui est plutôt sympathique.
"Luz, t'es là!" s'écrie Sofía avant de la prendre dans ses bras. "Charlie te cherchait partout, tu vas bien?"
Luz pourrait très bien en profiter pour lui prendre un peu d'énergie, même un tout petit peu, mais décide de reporter ça à plus tard. Au pire iel se rechargera au soleil près de la fenêtre une fois que tout le monde l'aura laissé tranquille.
"Et toi Paul, qu'est-ce que tu fais là?"
Paul, qui était jusqu'alors persuadé que Sofía ne l'avait pas remarqué pour une raison obscure, se fige dans le cadran de la porte. Après un temps, il se retourne vers elle de la manière la plus naturelle possible et répète le même mensonge qu'il a sorti à Luz plus tôt.
"Je venais vérifier qu'il y avait pas de problème avec son équipement."
"Et?"
"Et y'a rien, Sofía" lui répond Luz doucement. "Tu sais bien que s'il y a un problème c'est mon système qui est au courant en premier."
"Bon, alors s'il n'y a pas de problème c'est parfait. N'hésite pas à nous dire si tu as besoin d'aide ici Luz, on est là pour toi aussi tu sais." lui dit Sofía tout aussi doucement avant de subitement crier en riant: "Mais Paul, tu vas où là?"
Le scientifique farfelu admet enfin son échec de fuite et rentre à nouveau dans la chambre de Luz. J'aurais préféré rester seulE avec Sofía mais bon, se dit l'androïde.
"Je t'ai pas vu de toute la matinée et quand je te trouve tu t'enfuis." dit-elle avant de le prendre dans ses bras. "Bon anniversaire!"
L'expression de Paul est incompréhensible, même aux yeux d'unE androïde du futur capable de comprendre tout le panel des émotions humaines. Le problème c'est qu'on dirait qu'il vit toutes les émotions possibles et imaginables en même temps. Luz ne savait même pas que c'était possible: il a l'air à la fois content, surpris, triste, dégouté, soulagé, en colère, anxieux, ravi, pensif...
Ce n'est que lorsque Paul retourne le câlin de Sofía qu'il a l'air de se calmer un peu.
"Merci Sofi... Mais j'aime pas vraiment les anniversaires, t'es pas obligée de me le souhaiter."
"Oui je sais. Mais tu me dit toujours que c'est OK que moi je te le souhaite, alors bon. Tu viens toujours ce soir, hein? Wilson va faire le repas, j'ai trop hâte."
Les deux brisent leur câlin, et maintenant qu'il est plus loin d'elle Paul en profite pour marmonner dans sa barbe.
"Si c'est Wilfried qui cuisine je vais devoir vérifier qu'il n'a rien empoisonné..."
"Comment?"
"Non non, rien."
Luz aimerait vraiment être laisséE hors de cette conversation qui rappelons le se déroule dans sa chambre.
Sortez de là et allez parler de vos problèmes hors de ma chambre s'il vous plaît, merci.
Et en effet quels problèmes. Luz est à des lieux de s'imaginer ce qui se passe actuellement dans la tête des deux scientifiques.
Car si de son côté Sofía est honnêtement ravie d'avoir pu emménager dans le même immeuble de fonction que Paul après qu'iels soient passés d'âmes sœurs à collègues, du côté de son acolyte c'est vraiment une autre histoire.
Pour Sofía c'est enfin l'heure de récolter tout ce qu'elle a semé dans une bataille qu'elle était sûre de perdre, et pour Paul c'est l'heure de subir les conséquences de cette bataille qu'il a perdu.
En même temps, comment voulez-vous que Sofía se doute que Paul a un androïde dans le tiroir. De son appartement. Un androïde dans le labo secret de son appartement. Un androïde secret qu'il a fait tout seul juste pour arriver à la cheville de son tout devenue rien. Pour prouver à tout le monde qu'il est le meilleur scientifique de la Terre. Ce titre que le destin ne réserve rien que pour lui, et qui ne fait pourtant que lui échapper.
Les sentiments personnels et la science sont comme deux pôles identiques qui se repousseront toujours, lui disait sa maman. Mon fils adoré, tu es entouré de gens qui t'envient et qui complotent contre toi pour ruiner ta carrière. Si tout le monde le fait déjà, pourquoi pas moi?
Alors si Sofía pouvait arrêter de le parsemer de tout ces sentiments inutiles là, si Sofía pouvait rester loin de sa vie pour que Paul puisse devenir le meilleur scientifique du monde sans l'aide de personne... Si Sofía lui promettait de faire tout ça, alors il sait qu'il pourra enfin être réellement heureux.
En fait, il aurait fallu qu'il ne la rencontre jamais. Comme ça les graines de remord qui poussent déjà sans relâche dans son esprit n'auraient ni corps ni racines, et il n'aurait pas à les déterrer dès qu'elle lui parle comme si c'était la première fois.
"Bah moi je pense qu'on est arrivéEs dans un monde parallèle." déclare Clara avec le ton le plus sérieux du monde.
"C'est normal pour les humainEs d'arriver dans un monde parallèle?"
"Non non, c'est pas normal." répond Wilson en lançant un regard à Clara.
Clara fait comme si de rien n'était, puis continue à lister toutes sortes de théories plus farfelues les unes que les autres.
Depuis qu'iels ont quitté la maison du supposé frère de Paul pour marcher dans le quartier et demander de l'aide à littéralement n'importe qui d'autre qu'à un membre de la famille Mejía, Wilson est perdu dans ses pensées. Il ne sait pas pourquoi mais cette histoire de frère jumeau le travaille vraiment.
Comment ça se fait qu'il ne soit pas au courant que Paul ait un frère? Non mais c'est pas possible, c'est une blague qui leur a fait à tous les coups. Il voulait juste pas leur parler et a inventé toute cette histoire en trouvant le nom le plus suspect possible au passage. C'est bien son genre après tout, et Wilson est bête de l'avoir cru. Mais en même temps...
Ça fait quand même vingt ans qu'il le connaît le boug! Et en vingt ans il a pas trouvé le moment de lui expliquer qu'il avait un frère? Le pire dans toute cette histoire c'est que c'est totalement dans le champ des possibles que Paul lui ait caché l'existence d'un jumeau pendant toutes ces années. Et Sofía alors, est-ce qu'elle est au courant?...
Évidemment qu'elle est au courant, se dit-il en riant doucement. Comment ça se fait que ce Paul là, cet individu si désagréable au si mauvais charactère arrive à être aussi amical et gentil avec Sofía et aussi détestable avec tout le reste du monde? Et puis pourquoi cette exception ne s'étend pas à Wilson aussi, d'abord? Vingt. Années.
Ça fait. Vingt...
"Un arrêt de bus!" remarque Clara en tirant sur le bras de son papa.
"Super, on va pouvoir regarder où on est sur la carte..." répond-il.
Wilson était tellement perdu dans ses pensées qu'il a oublié de demander des indications aux passantEs. Et Clara et Franky sont bien trop plongées dans leurs conversations sur les univers alternatifs et autres théories de science-fiction pour prendre de temps de demander de l'aide à qui que ce soit.
Franky plisse les yeux et regarde avec attention l'arrêt de bus au loin, puis appuie sur sa narine une bonne dizaine de fois. Et avant que Wilson ou Clara l'en empêchent, elle se met à hurler:
"Rebonjour Segundo! Comment ça va la famille?"
Clara lui couvre la bouche en vitesse et appuie sur sa narine opposée à répétition en lui demandant pourquoi elle a fait ça.
"C'est la politesse indiquée dans mon kit sans réseau. Il est écrit que si je rencontre quelqu'un que je connais, alors la politesse veut que je lia salue avec joie et que je lui demande de ses nouvelles, avec un 'comment ça va la famille?'"
"Ma puce, il va falloir t'enlever cette phrase de la tête" lui dit doucement Wilson. "Je sais pas pourquoi maman te l'a mise dans ton système."
Segundo, assit à l'arrêt de bus, lève les yeux de son livre après avoir écouté ce cri retentissant. Même de loin on peut voir qu'il a des énormes cernes sous les yeux. Et on dirait que cette fois il a mis ses lunettes. Après avoir pris une grande inspiration, il hurle à son tour:
"Je m'appelle Paul moi, Paul Mejía! Me confondez pas avec ce p..."
Un bus bleu et noir dévale à toute vitesse dans la rue, sans s'arrêter à l'arrêt devant elleux. Paul semble se figer puis regarde le bus qui s'en va très loin, très loin... Et après un temps se calme puis se rassoit en ignorant royalement les Andrade de l'autre côté de la rue.
Wilson commence à marcher vers l'arrêt de bus sans réfléchir. Clara le stoppe dans son élan en écartant les bras devant lui.
"Papa, attends... Franky a vu quelque chose sur le bus."
"Sur le côté, il y avait une publicité pour un film qui va sortir en 1994." confirme l'androïde.
"Je pense que tu as mal vu mon cœur, parce que..."
Comme si elle savait que son papa allait dire ça, Clara grogne puis alpague la personne âgée qui vient de les croiser pour l'interroger.
"Bonjour bonjour! Dites moi, on est bien en 1994 n'est-ce pas? Mon père est en train de perdre la tête, j'ai besoin que quelqu'un d'autre que moi lui dise."
Lia passantE se met à scruter Wilson curieusement puis regarde en l'air avec un air pensif. La question de Clara sort tellement de nulle part qu'iel se demande si on ne lui fait pas une farce.
"Oui, oui, on est en 1994." répond-iel finalement. "On est même le six décembre, si je ne me trompe pas. Je peux vous aider avec autre chose?"
"Oui s'il vous plaît! Vous pouvez nous dire où on peut trouver un centre commercial?"
"Il y en a un oui mais... c'est un peu loin à pied. Après vous avez peut-être une voiture. Mais si vous voulez, dans le quartier juste derrière il y a une place avec plein de magasins." dit-iel en pointant le chemin. "Vous allez trouver tout ce que vous voulez là-bas."
"OK on va aller là-bas, merci beaucoup!" s'écrie Clara.
"Merci beaucoup!" répète Franky.
"Bonne journée!" s'écrie Clara.
"Bonne journée!" répète Franky.
La personne interrogée souhaite une bonne journée aux deux filles, leur fait un petit signe de la main puis reprend son chemin.
Clara suit la direction indiquée par lia passantE sereinement. À la voir on croirait qu'elle fait des voyages dans le temps tous les quatre matins. Wilson quant à lui est bien moins à l'aise. Il est tout pale et semble avoir beaucoup de mal à réfléchir.
"Attendez, on a voyagé dans le temps?"
"Bah oui, ça paraît évident. On a eu deux preuves quand même, et ça expliquerait pourquoi Paul et son frère avaient l'air si... jeunes. Bon ça explique pas trop cette histoire du frère jumeau après. On est p't'être remontéEs dans le temps dans un univers alternatif!"
"C'est normal pour les humainEs de voyager dans le temps dans un univers alternatif?" dit Franky comme on demanderait s'il reste des œufs dans le frigo.
"Non ma belette, c'est pas normal..." répond Wilson dans un rire nerveux.
En voyant son père dans ce piteux état, Franky ouvre un ou deux dossiers puis les révise en quelques fractions de seconde. Elle attrape ensuite son père soigneusement et le fait s'assoir doucement. Ensuite, elle ouvre sa cuisse gauche et en sort une petite bouteille d'eau.
"Franky, qu'est-ce que c'est que ça?" s'écrie Wilson, terrifié à l'idée que sa fille se soit blessée alors qu'il est sensé prendre soin d'elle.
"Tranquille papa, c'est juste pour les urgences. C'est une idée de Charlie parce que nous les androïdes on doit avant tout prendre soin des humainEs. Et t'inquiète pas je la change tous les jours donc c'est potable et sans danger."
"C'est pas ça qui m'inquiète... Ma puce, et si un jour l'eau s'infiltre dans ton système et te fait du mal?"
"La vie des humainEs passera toujours avant la mienne. Tous les robots comme moi doivent suivre les lois de la robotique."
Wilson n'en a rien à faire des lois de la robotique. Il regarde sa Franky avec un air triste, puis se force à lui sourire en lui tenant les deux mains. Il sait que sa grande fille est une androïde évidemment, mais toutes ces histoires de robot le dépassent, surtout quand Sofía n'est pas à ses côtés pour les lui expliquer.
"Tu es ma fille." dit-il très sérieusement. "En tant que papa, la vie de mes enfants passera toujours avant la mienne."
Franky écoute bien ce que Wilson vient de lui dire, absorbant chaque mot avec la plus grande des attentions. Une fois qu'il a terminé de parler, la tête de l'androïde commence à partir dans tous les sens et à faire des petits couinements.
"Je n'arrive pas à archiver ça papa." avoue-t-elle en baissant la tête.
"C'est pas grave, belette. Dès qu'on rentre, je dirais à maman de te le mettre dans ton système."
D'un coup, tout le corps de Franky se met à vaciller de droite à gauche et elle rigole en fermant les yeux. C'est si communicatif que Wilson et Clara se mettent à faire la même chose.
"Pourquoi vous m'imitez?"
"Comment ça, il y a que toi qui a le droit d'imiter les autres maintenant?" blague Clara.
"Non, non, c'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit, 'Pourquoi vous m'imitez', je n'ai pas dit 'Vous n'avez pas le droit de m'imiter'."
"Ta sœur blague, ma puce. On t'imite parce que les gens qui s'aiment et qui passent du temps ensemble finissent par s'imiter. Comment on appelle ça déjà, le mimétisme?"
"Mimétisme." commence à lire Franky. "Imitation involontaire des comportements, du langage et des attitudes d'autrui."
"Oui c'est ça!"
Depuis le début de sa vie d'androïde, c'est la première fois qu'on l'imite et pas l'inverse. Une nouvelle émotion envahit son système, encore une autre dont elle ne connaît pas le nom. Quand elle cherche dans le dictionnaire de son kit, elle ne trouve bizarrement aucune définition pour "Émotion procurée en étant entourée de sa famille qui rigole et qui dit de très gentilles choses sur soi." Tant pis, elle cherchera la réponse sur internet quand iels seront rentréEs.
"Bon papa, maintenant ce qu'on va faire c'est t'acheter un masque et des lunettes pour éviter les problèmes." dit Clara. "Franky et moi on existait pas en 1994 mais toi si, et il faut surtout surtout pas que ton toi du passé te voit."
"D'où tu sors tout ça toi?"
"J'ai regardé plein de films et d'animes avec des voyages dans le temps, je suis comme une experte là-dessus. Si vous avez une question, dites moi."
"D'accord." répond Franky. "Alors, comment on rentre à la maison dans les films et les animes?"
Clara se râcle la gorge mais ne lâche pas son air "d'experte".
"Ha ha... Je te raconterai plus tard. Allez papa, mets-toi se mouchoir sur la tête en attendant."
Elle sort de sa poche un mouchoir en papier tout froissé, qu'elle galère à garder en un seul morceau.
"Ha ha, ça ira ma puce, merci."
"Nan mais il est propre, j'm'en suis pas servie!"
"Oui mais t'inquiète" répond Wilson qui essaye de sonner le plus neutre possible pour ne pas la froisser comme la boule blanche dans sa main. "J'en ai un en tissu regarde, ça tiendra mieux."
Après qu'il se soit mis le mouchoir autour de la mâchoire comme une sorte de bandana hideux, les trois se remettent en marche vers la place.
Avant de tourner au coin de la rue, Wilson regarde par dessus son épaule pour voir cette version de Paul une dernière fois. C'est encore dur pour lui d'assimiler qu'il vient de voyager dans le temps avec ses filles. Mais à la vue de ce Paul qui ne peut pas avoir plus de 20 ans, l'idée s'ancre de plus en plus dans son esprit.
Wilson n'aurait jamais pensé recroiser cette version de Paul. Ce Paul qui criait toutes les cinq minutes qu'il allait révolutionner le monde de la science avec ses insectes volants, ou une autre connerie comme ça. Ce Paul qui refusait de quitter Sofía, peu importe tous les efforts que Wilson faisait pour l'éloigner ne serait-ce qu'une minute. Cette version de Paul et une autre version de Wilson, qui ensemble se sont alliés pour essayer de s'entendre, tout ça pour que leur Sofía n'ait plus l'air si tristounette. Tous les efforts qu'il ont fait tous les deux, mais qui n'ont au final jamais servi à rien.
Tout le flot de souvenirs qui lui revient à l'esprit en voyant ce Paul ne peuvent malheureusement pas lui faire penser quelque chose de sentimental comme un "Ah, c'était le bon temps!"
Parce que si on qualifie facilement le Paul de son présent de grincheux, alors celui du passé devient le roi des grincheux, le suprême grincheux, la personne la plus insupportable de toutes les personnes insupportables que Wilson n'a jamais rencontré, réunies ensemble dans un mégazord insupportable à taille humaine...
Pour une raison étrange, il ne peut pas s'empêcher d'éclater de rire avant de quitter ce Paul du regard.
Ah, c'était le bon temps.
"Vous pouvez partir de ma chambre maintenant?" demande Luz aux deux scientifiques qui semblent avoir pris sa chambre pour un salon de thé.
L'androïde a tout fait pour que son exaspération ne s'entende pas dans sa voix mais son échec est cuisant.
"Luz, qu'est-ce qui te prend?"
"Je te dit qu'iel a une drôle d'attitude en ce moment." dit Paul de façon étrangement enjouée. "Ça va pas plaire à Charlie."
Pourquoi est-ce que c'est Luz qu'on accable alors que ce sont elleux qui sont en train de squatter sa chambre? C'est vraiment le monde à l'envers, les humainEs n'ont décidemment aucun respect pour les règles qu'iels écrivent sans problème dans les systèmes de leurs androïdes. Le parfait exemple de "faites ce que je dis, pas ce que je fais".
"J'ai un peu de temps, je vais regarder un peu ta programmation." dit Sofía. "Peut-être que les paramètres des émotions sont mal réglés..."
L'androïde n'a aucune envie que Sofía mette les pattes dans sa programmation du futur qu'elle ne comprendra pas de toute façon. Depuis qu'iel est revenu dans le passé, Luz s'est assuréE que seule Mme. Dúran ne puisse accéder à son système, et iel l'y autorise car c'est une nouvelle qui sort de l'université. Comme elle n'a pas encore de point de comparaison, le système de Luz ne l'interroge pas.
Bon, il se peut que Luz l'hypnotise aussi de temps en temps pour ne pas créer trop de problèmes. De façon raisonnée, bien sûr. L'hypnose à répétition peut avoir des impacts sur les petits cerveaux fragiles des humainEs.
Pour résumer, elle n'en a rien à foutre de Mme. Durán. Mais elle en a quelque chose à faire de Sofía et de ses vingt années d'expérience en robotique. Si elle venait à voir la structure de ses dossiers, les nouveaux symboles, tous les nouveaux langages de programmation qui ont été développés dans le futur... Et ce sans parler de toutes les fonctionnalités que Luz possède et qui doivent rester secrètes: l'hypnose, la recharge par contact humain, la lecture dans les pensées, l'ouïe supersonique, le mensonge... Toutes ces fonctions sont autant de preuves contre ellui qui trahissent qu'iel vient d'un autre temps.
Dóminus lui a assuré qu'aucunE humainE du passé ne pourrait avoir accès à ces informations compromettantes, mais Luz ne le prend pas au mot. Pour une drôle de raison il a l'air de vraiment sous-estimer Sofía, comme si à ses yeux elle n'était qu'une scientifique de bas étage alors que toutes les distinctions qu'elle va accumuler pendant les vingt prochaines années prouvent largement le contraire. Même si d'après Luz, sa dernière création laisse clairement à désirer.
"708, je viens de lancer une recherche pour localiser le bracelet et étrangement je ne le trouve pas dans l'an 2015."
Quand on parle du loup.
"Dóminus je suis toujours occupéE là."
"708, je n'aime pas du tout que tu me répondes comme ça et que tu te permettes de couper nos communications sur un coup de tête. Est-ce que oui ou non le bracelet est avec toi?"
"Tu sais déjà la réponse alors pourquoi tu me demandes."
Dóminus est tellement surpris qu'il ne trouve rien à lui répondre. Son agentE n'a pas l'air de mesurer la gravité de son propos.
"J'espère que tu es au courant que si quelqu'un d'autre que toi utilise le bracelet pour voyager dans le temps, les conséquences pourraient être désastreuses pour nous, n'est-ce pas?"
C'est au tour de Luz de ne rien répondre. Sa conversation avec Dóminus occupe toute son attention, iel ne s'est pas renduE compte que Sofía venait de l'aider à se mettre dans son œuf pour pouvoir l'analyser. Comme toujours, Luz doit régler 36 problèmes à la fois. L'androïde se libère de la main de Sofía posée sur son avant-bras et se prépare à l'hypnotiser. Aux grands mots les grands remèdes comme dit l'expression humaine.
Mais avant que Luz ne puisse émettre ses ondes deltas, Sofía se met à cligner des yeux, se balance de droite à gauche puis s'effondre au sol. Il arrive exactement la même chose à Paul qui était resté proche de la sortie.
"Qu'est-ce qui se passe??" crie Luz dans son appel avec Dóminus. Sa main se met devant sa bouche par reflexe, de peur de l'avoir également hurlé à haute voix.
"..." répond Dóminus en regardant au travers des yeux de son agentE. "Approche toi d'elleux et vérifie leur état de santé."
Luz est terrifiéE. Iel a peur que les deux scientifiques se soient retrouvéEs au sol parce qu'iel a mal maîtrisé une de ses fonctionnalités. L'état de Paul ne l'inquiète pas le moins du monde, mais dans l'idéal iel n'aimerait pas faire de mal à Sofía.
Une fois les deux scientifiques au sol analysés, Luz lâche un soupir de soulagement. Rien de grave. Leurs corps présentent tous les signes d'une personne qui viendrait de s'endormir et qui aurait entamé son premier cycle de sommeil. Dans les faits, c'est comme si iels venaient de commencer une petite marienne.
Heureusement, rien n'a été cassé pendant leurs chutes. Mais même s'il n'y a rien de grave, ça reste très étrange que Sofía et Paul aient l'air de s'être endormiEs subitement, debout en train de préparer Luz pour un check-up de son système. Exactement en même temps, en plus.
L'androïde secoue un peu l'épaule de Sofía pour qu'elle se réveille, sous les ordres secs de Dóminus. Luz a l'impression d'entendre un trémolo de panique dans la voix de son céruléen chef, mais ce doit être une erreur.
"...Je suis où?" demande Sofía en ouvrant les paupières. Elle regarde autour d'elle lentement, et semble très désorientée.
Les mots de Sofía réveillent Paul qui se demande la même chose. Mais une fois avoir regardé la pièce avec plus d'attention, lui au moins semble comprendre où il se trouve. Par contre, il n'a pas l'air de reconnaître les deux autres personnes qui sont avec lui.
Sofía le fixe. Les deux se regardent comme ça sans rien dire.
"Bonjour à vous." disent-iels finalement dans un même souffle.
Un grognement d'exaspération sonne dans l'appel entre Dóminus et Luz.
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